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Tribune : “Visage trompeur à la barre : E. Mwangachuchu n’est pas un minable, c’est un lion dans la peau d’un agneau” (Paul Paluku Kasereka).
Visage trompeur à la barre : E. Mwangachuchu n’est pas un minable, c’est un lion dans la peau d’un agneau
C’est dans une apparence d’un homme frêle, innocent, victime d’une machination que le député national élu du Masisi et patron de SMB (Société Minière de Bisunzu) Edouard Mwangachuchu Hizi se présente devant la barre à la Haute cour militaire à Kinshasa. Il y est poursuivi pour haute trahison, association de malfaiteurs, atteinte à la sécurité de l’Etat, détention illégale d’armes et munitions de guerre, participation à un mouvement insurrectionnel et incitation des militaires à commettre des actes contraires au devoir et à la discipline. Sa posture inspire même pitié au point que, dans les coulisses, certains membres de la composition en seraient arrivés à le trouver minable. Il n’en est pas un. C’est plutôt un lion dissimulé dans la peau d’un agneau. Ancien cadre du RDC, président du CNDP (Congrès National pour la Défense du Peuple) après Bosco Ntaganda, entremetteur entre le M23 et l’ancien président Joseph Kabila, il inflige, sur fond de l’exploitation minière, moult exactions et abus graves des droits humains aux populations locales dans le Masisi qui ne lui reconnaissent pas le droit de propriété sur le PE 4731 acquis comme butin de guerre depuis 2000. Les corps de trois des victimes de sa garde industrielle sont sans sépultures et sont gardés depuis juin 2019 à la morgue de l’Hôpital de référence de Goma ; leurs parents clamant que justice soit faite.
Après plusieurs dénonciations il y a belle lurette faisant passer Edouard Mwangachuchu Hizi comme l’un de majeurs instigateurs de l’insécurité qui prévaut dans le Masisi, plus précisément à Rubaya, plateforme de négoce des minerais des 3 T, principalement le coltan, lesquelles dénonciations ontdébouché il y a plus d’une année sur une passe d’armes à l’Assemblée nationale entre lui et son collègue Justin Ndayishimiye, également élu du Masisi, c’est à peine que le pays s’emploie à lever un coin du voile sur ce personnage, à la limite indéchiffrable. A l’occasion, bien entendu, de sonprocès en flagrance à la suite de la découverte des caches d’armes dans sa concession minière (PE 4731) à Rubaya (Masisi), consécutivement à la tentative de capture de cette cité par les terroristes du M23 et leurs alliés des RDF, et des effets militaires (42 munitions de 9 mm GP, une gaine de revolver GP, etc.) lors de la perquisition opérée à sa résidence de Kinshasa le 1er mars 2023 en sa présence et celle de son épouse. Arrêté le même jour, le patron de SMB croupit au CPRK (ex-prison de Makala) et l’affaire suit son cours devant la justice militaire. Il a été rejoint par le capitaine Robert Mushamaliro, commandant pendant de longues années du détachement de la PMH (Police Mines et Hydrocarbures) affecté au PE 4731 de SMB. Cet officier a été arrêté à Goma, puis transféré à Kinshasa. Il en sait sûrement beaucoup des caches d’armes découvertes sur son terrain de chasse.
Il eut fallu la présente guerre menée sous couvert du M23 avec toutes les menaces qu’elle fait peser sur Rubaya pour qu’enfin ce qui paraissait jusque-là comme délations de la part des populations locales, voire des détracteurs politiques d’Edouard Mwangachuchu Hizi, prenne corps. Le PE 4731 a toujours été soupçonné par les populations locales victimes de la persécution d’être le repaire des anciens rebelles du RCD et du CNDP non reconvertis et des jeunes recrues en provenance du Rwanda. Commandant second de la Police au Nord-Kivu,le colonel Van Ngoy Kasongo, suspecté de couvrir dans cette concession des éléments étrangers à la PNC en les dotant en tenues et armes, a été relevé de ses fonctions en avril 2022 et rappelé par sa hiérarchie à Kinshasa.
Aussi la connexion est-elle avérée entre Edouard Mwangachuchu et les différents mouvements rebelles qui ont opéré et opèrent à l’Est du pays. Ce fut une tête couronnée du RCD/Goma. Son entreprise SMB, anciennement MHI (Mwangachuchu Hizi International), s’est vue attribuée jadis comme butin de guerre le PE 4731 (36 carrés), amputé en toute anarchie du PE 76 (360 carrés). Elle a émergé dans la galaxie de ce mouvement armé comme entreprise écranpermettant aux armées autrefois occupantes d’exploiter à l’ombre les ressources du Congo. Ensuite, ses intérêts l’ont conduit au CNDP, énième mouvement rebelle soutenu par le Rwanda et devenu par la suite parti politique. Aussitôt après les élections générales de 2011 à l’issue desquelles il est élu député national dans le Masisi grâce au vote imposé en sa faveur par les militaires du CNDP, le patron de SMB est nommé président de cette structure par Bosco Ntanganda, condamné à 30 ans par la CPI (Cour Pénale Internationale) pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en Ituri. Et sous Bosco Ntanganda, SMB jouissait du quasi-monopole de l’exploitation et la commercialisation des minerais, principalement du coltan, dans le Masisi. Ce qui n’agréait pas et n’agrée pas toujours les populations locales qui ne lui reconnaissent pas le droit de propriété sur le PE 4731, un patrimoine de SAKIMA. D’où les conflits interminables avec les populations envenimant la situation sécuritaire et la paix sociale.
Edouard Mwangachuchu ne s’est pas affiché ouvertement avec le M23. Toutefois, ses bons rapports avec une partie de ses anciens alliés du CNDP devenus M23 lui ont permis de jouer aux bons offices dans les négociations entre ces derniers et le gouvernement Kabila. Dans sa livraison du 29 août 2012, le journal «Le Potentiel» notait : «Le président du CNDP Edouard Mwangachuchu, toujours Sénateur, demanderait au gouvernement de comprendre ses amis rebelles du M23 en mettant en avant l’esprit de réconciliation, comme si c’est le gouvernement qui pose problème».
Pas donc de dessin à faire. La connexion est avérée entre Edouard Mwangachuchu et des différents groupes rebelles qui ont laissé des traces indélébiles à l’Est de la RDC. Tel est le portrait de cet homme déféré présentement devant la Haute cour militaire. Ce n’est pas un minable, plutôt un lion revêtu de la peau d’un agneau.
© 2023 Tokia.cd | Dieudonné Tshilombo